Ecrit par
Bruno Lesergent
Pourquoi le stress est devenu aujourd’hui un concept fourre-tout que nous portons en y déversant tout et n’importe quoi. Nous pourrions d’ailleurs y substituer facilement tout synonyme montrant notre désintérêt. Voire notre agacement ou notre frustration face à une situation en étant : exaspéré, tendu, nerveux, crispé, etc…
Plus personne aujourd’hui n’est ni surchargé, ni ennuyé, ni débordé, ni contrarié, mais tout le monde est stressé ! Ce succès indéniable auprès du public, traduit souvent l’expression sémantique d’un mal-être immédiat qui s’amalgamerait dans une anxiété globale.
La problématique du stress est une question qui revient souvent dans notre société, et les causes peuvent en être multiples : contraintes au travail, conflits relationnels, pressions liées à la vie quotidienne, etc. Prenons le temps d’en comprendre sa réalité, ses fonctions et la représentation que nous pouvons en faire pour, peut-être changer la réalité que nous accordons.
Alors le stress, mais qu’est-ce que c’est ?
Imaginez que vous êtes tranquillement installé chez vous, dans votre canapé, somnolant…
Soudain, un gros rat surgit de nulle-part ! À cet instant, et sans même vous en rendre compte. Vous vous retrouvez perché sur votre table de salon, haletant, le cœur battant, tous vos sens en alerte et prêt à entrer guerre !
À l’origine de votre superbe performance, digne d’un athlète du saut en hauteur. Vous venez de vivre un violent choc émotionnel fait de peur, de surprise voire de dégoût face à un «stresseur». Ce qui a déclenché en vous toute une série de réactions physiologiques et psychologiques, pour faire face à ce danger.
Le stress, que vous venez de vivre, est la première réaction normale et naturelle du corps face à une contrainte, un danger ou à un changement. Hans SELYE, médecin et pionnier de l’étude du stress, le définit comme l’ensemble des moyens physiologiques et psychologiques mis en œuvre par une personne pour s’adapter à un événement donné.
Décortiquer votre stress : le Syndrome Général d’Adaptation ou (SGA)
Ce phénomène n'a été reconnu que depuis 1946, c’est aussi Hans Selye qui grâce à ces travaux en endocrinologie popularisa cette notion en développant la notion du SGA communément appelé le « stress ».
C’est la réaction que vous venez de vivre face à cet évènement imprévu qui vous a permis de vous adapter et qui se décompose ainsi (dessin ci-contre):
"Notre plus grande arme contre le stress est notre capacité à choisir une pensée plutôt qu'une autre". William James.
Le stress et ses conséquences : Un jeu d'hormones !
Et sur le plan physiologique, que s’est-il passé ?
Pour simplifier, ce choc quasi instantané qui vous a propulsé sur votre table est la conséquence de la libération d’hormones qui vous ont boosté au niveau physique, émotionnel et qui ont aussi successivement provoqué :
Une décharge de noradrénaline et d’adrénaline (hormones produites lors d’une forte émotion : peur, surprise, colère, etc…) qui agissent ici comme le déclencheur et le transmetteur de la réaction afin de réagir au potentiel danger.
Une montée du cortisol (hormone de l’énergie qui vous transforme en « superman ») vous permet de « combattre » et protéger votre corps en l’insensibilisant, en priorisant l’action des muscles et de certains organes.
Une libération de dopamine (l'hormone du plaisir immédiat ou du soulagement) qui intervient lorsque le processus s’épuise et permet au corps de se détendre au travers l’activation de cette récompense.
Le cortisol, l’hormone méconnue du stress
Si l’adrénaline ne passe pas inaperçue puisqu’elle mobilise instantanément tout l’organisme, le cortisol, lui, agit en arrière-plan. Cette hormone métabolise les glucides et la dégradation des lipides pour augmenter la synthèse du glucose. Elle offre alors de l’énergie pour appuyer l’action de l’adrénaline tout au long d’une réaction de stress.
Le cortisol : à quoi ça sert ?
Après avoir capté l’énergie nécessaire, le cortisol la dirige au bon endroit du corps, selon vos besoins (ex : dans les muscles de vos jambes si vous devez prendre la fuite !). Le cortisol, dans cette fonction, contribue réellement à vous sauver la vie. De plus, en dehors des pics de stress, il agit à maintenir l'équilibre énergétique en régulant la distribution de ce même glucose dans votre organisme, tout au long de la journée. Le cycle de sécrétion du cortisol se caractérise par une production plus importante le matin pour diminuer lentement au cours de la journée. Le fameux coup de barre de l’après-midi, c’est lui !
Trop ou pas assez de cortisol, quelles conséquences ?
L’hypersécrétion de cortisol, en cas de stimulation constante par un stress psychologique ou social, a des effets délétères dans la durée sur de nombreuses fonctions : cardio-vasculaire, reproductive, digestive, immunitaire, et aussi cérébrale. Cette hormone peut provoquer, à terme, une diminution du volume de l’hippocampe ainsi que des altérations de la mémoire.
À contrario, suite à une phase d’épuisement du taux de cortisol lors d’un stress chronique ou dépassé. Il favorisera l’apparition d’un burnout ou d’une dépression. Un taux anormalement bas de cortisol peut s’expliquer par l’usure du système face à un stress suffisamment long et intense.
Le cortisol, malgré sa mauvaise réputation, est nécessaire pour une santé optimale. De plus, il brûle les graisses lorsqu’il est sécrété dans les bonnes circonstances. Mais un taux de cortisol chroniquement trop élevé ou trop bas peut être destructeur. Il peut stimuler des compulsions alimentaires ou renforcer des addictions, en stimulant les centres de récompense. La clé avec le cortisol, c’est l’équilibre...
"Faites attention au stress. Il vaut mieux être en retard dans ce monde qu'arriver trop tôt dans l'autre". Auteur anonyme
Mais qu’est-ce qui nous stress ?
À l’origine, le stress est induit par la peur et le besoin de survie. Il nous permet, depuis des milliers d’années de faire face au danger. Le souci de notre évolution depuis l’âge de pierre est que nous semblons l’accumuler au fil du rythme de nos vies sans nous offrir de véritable répit.
L’excès de stress est bien connu pour ses effets directs, nervosité, irritabilité et il est souvent associé à des risques d’insomnies, de phobies, d’anxiété, voire d’épuisement, de burnout, ou de dépression.
Quelque-soit l’âge, le stress est parfois responsable de nombreux symptômes physiologiques. Le corps nous parle, à nous de savoir lui prêter une oreille attentive pour mieux prendre soin de lui!
Les stresseurs, les générateurs de nos stress
Il en existe deux grandes catégories. Ils sont à l’origine de la production d’hormones en agissant sur notre réaction au stress. Chacun de nous a des perceptions très personnelles face à ces stresseurs. Pour certains les situations seront assimilés à un « enfer », alors que d’autres y trouveront une source de motivation extrême.
Les stresseurs physiques et absolus sont les tensions
ou contraintes objectives interprétées directement
comme étant stressants:
Températures très basses ou très chaudes
Blessures traumatiques, maladies chroniques
Douleurs spontanées (Étourdissements, Malaise vagal, Tachycardie, Infarctus, etc.)
tremblement de terre, tsunami, explosion, attentats, etc.
Les stresseurs psychologiques et relatifs sont les perceptions subjectives d’événements, de situations ou relationnelles que nous interprétons comme négatif ou dangereux :
pression au travail, les embouteillages, les impôts, un examen
Être en retard, sentiment d’insécurité, inquiétude pour l’avenir, peur de la maladie
Conflits, solitude, mariage, divorce, naissance, décès, etc.
Chronique ou cumulatif, quand le stress devient nocif
Comme chaque goutte remplissant une baignoire, le stress s’additionne. Chaque petit tracas de la vie, chaque pression professionnelle supplémentaire, chaque petite frustration et risque quotidien facilite ce remplissage. Soit, c’est une exposition mineure, prolongée et répétitive qui sape votre résistance à petit feu, nous parlerons alors de stress chronique. C’est un stress qui se développe lentement, mais qui se renforce rapidement si votre récupération devient insuffisante.
Ou alors, nous concentrons successivement une série d’événements difficiles (au niveau privé ou professionnel) qui représenteront
l’ajout répété de seaux d’eau nous donnant le ressenti
de nager à contre-courant en nous amenant
inéluctablement à avoir l’impression de nous noyer.
C’est le stress cumulatif.
Ces stress peuvent s’avérer délétères sur le plan physiologique, cognitif et comportemental avec peut-être en finalité, de graves conséquences :
De possibles dérèglements hormonaux (insomnies, poids instables, eczéma…).
De potentiels somatisations (ulcères, troubles digestifs, rhumatismes, boule au ventre, palpitations, tension artérielle et musculaire, migraines, problèmes immunitaires…).
Des fragilités émotionnelles (instabilité, irascibilité, anxiété, nervosité, pleurs, crises d’angoisse, déprime, dépression…).
Des pertes de capacités (troubles de la mémoire, difficultés de concentration, indécisions, baisses de créativité, négativité chronique…).
Enfin, le stress a des conséquences sur le plan relationnel dû à un repli sur soi, ou à des sautes d’humeurs. Lorsqu’il devient chronique, il peut conduire au burn-out. N’oubliez pas également qu’il est contagieux et peut donc toucher votre entourage.
Cette difficulté à s’adapter aux soucis quotidiens est présent et ressenti aussi
chez les enfants. Les parents en parlent plutôt comme des états d’énervement
ou de colère, mais la cause en est bien souvent le stress. Les enfants sont de véritables «éponges émotionnelles», donc très perméables aux facteurs anxiogènes qui affectent les adultes. C’est un potentiel point d’alerte à ne pas négliger.
Comments